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LE DESENGAGEMENT DE L’ETAT

« Mon soutien psy » permet à l’Etat de se désengager de la psychiatrie, accuse un collectif

Plus de 170 enseignants-chercheurs en psychologie clinique appellent, dans une tribune publiée dans Le Monde, à la mise en place d’un moratoire sur le dispositif « Mon soutien psy ».

Lancé en 2022, le dispositif « Mon soutien psy » fait face à de nombreux défis, soulevés dans un rapport remis au Parlement fin mars. « Si le taux de recours au dispositif atteste bel et bien d’un criant besoin de soins », « la faible adhésion et le taux d’abandon anormalement élevé font craindre des prises en charge inadaptées », souligne un collectif de 173 enseignants-chercheurs en psychologique clinique, dans une tribune publiée dans le journal LE MONDE.

Tous jugent sévèrement ce dispositif qui permet, selon eux, à l’Etat de justifier son désengagement en psychiatrie. « On ne saurait considérer comme une réussite le fait que seul un quart des patients atteigne la huitième séance sur les douze prévues – la moyenne s’établit à 4,8 séances par patient », écrivent ainsi les signataires qui assurent, par ailleurs, « que la majeure partie des organisations représentatives de la profession [de psychologue] continue [de] refuser obstinément le principe » du dispositif. « En effet, dans sa forme actuelle, ‘Mon soutien psy’ reste perçu comme un levier de retrait progressif de l’Etat dans la prise en charge du soin psychique, au profit d’une ubérisation du secteur », insiste le collectif.

Mais pour les signataires, une autre difficulté s’impose : « Mon soutien psy », qui devait surtout permettre à des patients ayant des « troubles légers à modérés » de consulter un psychologue, accueille aujourd’hui de nombreuses personnes ayant des pathologies psychiatriques sévères. « Ce glissement est révélateur du système mis en place : faute d’accès à des soins adaptés en structure dédiée, les patients les plus en souffrance se tournent vers une offre libérale inadaptée, conçue pour des cas moins complexes, alors qu’ils requièrent à l’évidence un suivi pluridisciplinaire que seule l’offre conventionnelle de secteur peut garantir », analysent les 173 signataires, pour qui le dispositif ne répond « pas à une exigence de qualité des soins, mais à une logique économique ».

Mettre en place un moratoire 

« Une consultation chez un psychologue conventionné coûte 50 euros (assumés à 60% par l’Assurance-maladie et 40% par les complémentaires), contre près du double pour un acte en CMP, en raison de la prise en charge globale coordonnée », poursuivent-ils. Une raison qui explique pourquoi de nombreux psychologiques refusent « un conventionnement qui les contraint à accompagner des patients en grande souffrance, selon une tarification inférieure à l’offre libérale, tout en se privant de la qualité de l’offre multidisciplinaire d’un CMP ».

De plus, le collectif déplore la volonté de renforcer le dispositif portée par le ministre chargé de la Santé, Yannick Neuder, et son souhait de travailler au remboursement de « modules de psychothérapies spécialisées ». Cela pourrait « conduire à promouvoir une forme inédite de psychothérapie d’Etat », estiment ainsi les signataires, qui appellent à la mise en place d’un moratoire sur le dispositif « Mon soutien psy » « dans sa forme actuelle » afin d’en évaluer « l’efficacité sur le plan de la dépenses publique, et d’organiser une véritable concertation avec les professionnels du domaine. » 

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