Interdiction des jeux vidéo en ligne pour les mineurs : « La décision de l’Etat chinois pourrait marquer un tournant »
La Chine compterait 720 millions de joueurs, de loin le pays qui compte le plus d’adeptes et qui abrite le plus gros acteur mondial, Tencent. Mais cette interdiction ne pose pas que des questions économiques.
Il faudrait pourtant se garder de sourire de la mesure, curiosité d’Etat totalitaire, avide de formater les esprits par une censure implacable. Cette décision pourrait marquer un tournant dans une industrie devenue considérable. Le marché des jeux vidéo représente des recettes mondiales de 300 milliards de dollars en 2020 (environ 253 milliards d’euros, chiffres Accenture), soit plus que le cinéma et la musique combinés.
On compterait 2,7 milliards de joueurs sur la planète dont… 720 millions de Chinois. De loin le pays qui compte le plus d’adeptes et qui abrite le plus gros acteur mondial, Tencent, à la fois champion des médias et de la communication avec sa messagerie WeChat, un mélange de Facebook, de Vivendi et d’Ubisoft. Il contrôle des jeux stars comme PUBG et Honor of Kings, qui ont chacun généré 2,5 milliards de dollars (environ 2,1 milliards d’euros) de recettes en 2020.
Une inquiétude mondiale
« Même pas mal », s’est empressée de clamer l’entreprise en approuvant la décision de Pékin. Après tout, les mineurs ne représentent qu’une petite partie des joueurs, près de 15 % du total, dans le pays et encore moins du chiffre d’affaires. Mais les analystes ont vite pointé le risque pour la société de voir se tarir sa source de nouveaux joueurs. Les trentenaires qui constituent son réservoir le plus profitable ont tous commencé en culotte courte.
Nombre de parents ne parviennent plus à domestiquer l’usage des jeux par leurs enfants dès qu’ils abordent l’adolescence et qu’ils possèdent leur smartphone
Le problème pour l’industrie du jeu vidéo est que cette décision chinoise n’est que l’expression caricaturale d’une inquiétude qui traverse le monde entier sur l’addiction des plus jeunes à des pratiques parfois destructrices de leur temps de sommeil et de leur assiduité scolaire. En 2019, l’Organisation mondiale de la santé a classé le trouble du jeu vidéo (gaming disorder) comme une véritable maladie, avec ses conséquences sur la santé, la scolarisation et la socialisation. Selon les enquêtes, seuls quelques pour-cent des adeptes sont touchés, mais leur nombre a sérieusement augmenté avec la généralisation des jeux en ligne multijoueurs sur téléphone mobile.