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De l’hyperactivité au TDAH : éviter le surdiagnostic

Avec une inflation de 11% d’enfants américains atteints de TDAH (ou trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité), les cas ont été multiplié par 3 en vingt ans. Dans 6% de ces cas, l’enfant est traité par des médicaments; ce trouble atteint 20% des adolescents dont la moitié sont traités chimiquement.

Les taux ont augmenté aux USA à la fin des années 1990 après que de nouveaux médicaments aient été brevetés et mis sur le marché. Or, un traitement médicamenteux doit être donné quand d’autres solutions n’ont pas fonctionné.

Surtraiter ce trouble est d’autant plus facile qu’il est défini par des symptômes et comportements qui ne sont pas spécifiques, c’est à dire que l’on retrouve dans d’autres troubles. Une faible concentration, de l’impulsivité et de l’hyperactivité. En France une étude de 2011 indique 3,5% d’enfants atteints entre 6 et 12 ans.

Un livre est paru ces  dernières années du psychiatre Patrick LANDMAN – dont je m’inspire ici largement – qui permet d’alerter sur les dérives de ce diagnostic; le  trouble du déficit de l’attention est désormais trop vite relié au TDAH. Mais la clinique nous apprend qu’un enfant qui montre des troubles de l’attention peut exprimer une palette de difficulté. Il est important de ne pas conclure trop vite pour ne pas passer à côté de la vérité d’un patient.

De fait, une confusion s’est vite imposée entre agitation et inattention. Un autre facteur entre en ligne de compte: l’impulsivité qui est plus communément répandue, et notamment chez les adolescents. Les corrélations de certains symptômes pour certains patients ne fait pourtant pas un syndrome. Et comme le rappel l’auteur de ce livre « il faut le rappeler encore une fois: il n’existe à l’heure actuelle aucun marqueur biologique d’aucune des grandes maladies mentales, que ce soit la schizophrénie, l’autisme ou les troubles bipolaires ». 

Faire d’un symptôme un syndrome : quel en est le sens clinique ?

On est passé d’un symptôme d’hyperactivité  à un syndrome, voire une maladie, qui ne fait pas que des malheureux puisque l’industrie pharmaceutique commercialise une molécule à succès : le « méthylphénidate ».

Avec certaines de mes consoeurs psychologues, nous constatons les dérives de cet estampillage « TDAH » qui permet de mettre un nom sur un ensemble de symptômes. Cependant cela demande du temps pour découvrir la cohérence ou le sens de ces manifestations cliniques. Diagnostiquer « TDAH » permet aussi à l’école, à la famille de ne pas se poser plus avant de questions. De ne pas prendre ce temps nécessaire, ce temps de la clinique qui permet de comprendre, d’ajuster, de négocier avec des symptômes qui ne s’installent pas par hasard et sont préjudiciables à tout le monde. La prescription médicamenteuse ne convient pas à tous les enfants; certains deviennent justement hyperkinétiques c’est à dire encore plus agités et ne dormant plus. D’autres sont « calmés » mais pour des temps précis.

Nous assistons actuellement à un certain rejet des médicaments pour des médecines plus naturelles, pour une approche plus douce et dans le même temps, de plus en plus d’enfants dits « agités » sont traités chimiquement.

La conclusion revient à l’auteur de ce livre « il convient de ne pas oublier qu’un enfant est un enfant, qu’il est en développement et qu’il n’a pas autant de possibilités d’exprimer une souffrance que les adultes. L’expression motrice est une des plus aisément disponibles et elle a le mérite de ne pas passer inaperçue longtemps…. ».

Il est donc juste et sage de prendre le temps d’une analyse détaillée des symptômes avant de conclure à un TDAH. Nos malaises s’impriment dans le corps quand ils ne peuvent plus être exprimés….

A. Ponchel, psychologue clinicienne

 

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