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ALERTE EN PSYCHIATRIE : lien entre épisode dépressif et virus actuel

ENTRETIEN. « Il faut que la psychiatrie devienne une médecine de précision », plaide Marion Leboyer

Depuis le début de la pandémie, la psychiatre Marion Leboyer, Grand Prix Inserm 2021, alerte sur la nécessité d’inclure les personnes atteintes de troubles mentaux dans les publics prioritaires, notamment pour la vaccination. Ses recherches visent à personnaliser les traitements des troubles psychiatriques.

Responsable du pôle psychiatrie et addictologie à l’hôpital Henri-Mondor de Créteil, Marion Leboyer, 64 ans, est directrice du laboratoire Neuropsychiatrie translationnelle de l’Inserm (soixante-deux personnes). Elle est également directrice de la fondation Fondamental, qui a pour objectif l’innovation dans l’organisation des soins, le soutien à la recherche, la formation et l’information sur les maladies mentales.

Depuis l’arrivée du Covid, son équipe a beaucoup œuvré à mesurer l’impact de la pandémie sur la santé mentale des Français. Elle a très tôt alerté les pouvoirs publics sur la nécessité d’inclure les personnes souffrant de troubles mentaux parmi les publics prioritaires à la vaccination (1). Entretien.

Quelle est votre recherche la plus citée ?

Mon premier papier sur un gène important de l’autisme, publié dans Nature en 2003. Les recherches sur les terrains génétiques des maladies ont évolué dans les années 2000. Progressivement, nous avons enrichi le labo avec des outils et des méthodes permettant de comprendre certaines maladies mentales sur le plan génétique et immunologique.

Vous êtes une pionnière de l’immuno-psychiatrie. En quoi cette spécialité consiste-t-elle ?

À essayer de comprendre comment les infections et l’inflammation peuvent avoir des influences sur des maladies mentales.

Responsable du pôle psychiatrie et addictologie à l’hôpital Henri-Mondor de Créteil, Marion Leboyer, 64 ans, est directrice du laboratoire Neuropsychiatrie translationnelle de l’Inserm (soixante-deux personnes). Elle est également directrice de la fondation Fondamental, qui a pour objectif l’innovation dans l’organisation des soins, le soutien à la recherche, la formation et l’information sur les maladies mentales.

Depuis l’arrivée du Covid, son équipe a beaucoup œuvré à mesurer l’impact de la pandémie sur la santé mentale des Français. Elle a très tôt alerté les pouvoirs publics sur la nécessité d’inclure les personnes souffrant de troubles mentaux parmi les publics prioritaires à la vaccination (1).

Quelle est votre recherche la plus citée ?

Mon premier papier sur un gène important de l’autisme, publié dans Nature en 2003. Les recherches sur les terrains génétiques des maladies ont évolué dans les années 2000. Progressivement, nous avons enrichi le labo avec des outils et des méthodes permettant de comprendre certaines maladies mentales sur le plan génétique et immunologique.

Vous êtes une pionnière de l’immuno-psychiatrie. En quoi cette spécialité consiste-t-elle ?

À essayer de comprendre comment les infections et l’inflammation peuvent avoir des influences sur des maladies mentales.

« Chercher des thérapies ciblées »

L’inflammation est une voie majeure des troubles mentaux ?

On retrouve des marqueurs biologiques d’inflammation à bas grade chez 40 % des patients. L’inflammation entraîne une série d’activations de voies biologiques. Que ce soit la dépression, l’autisme ou la schizophrénie, on rassemble des groupes de patients très hétérogènes sous le même trouble. Nous essayons de caractériser des sous-groupes de patients homogènes afin de chercher des thérapies ciblées.

Les causes de ces inflammations sont-elles connues ?

Elles sont très variables et inscrites dans le temps. C’est la conséquence de l’interaction entre un terrain génétique favorable et des facteurs de risques environnementaux, que ce soit lié à une hygiène de vie ou l’exposition à des polluants. Des stress traumatiques également. Tous ces facteurs contribuent à entretenir une inflammation active qui peut avoir un effet sur la santé mentale.

Comment ces phénomènes se produisent-ils ?

Deux exemples : la réactivation d’endovirus, des particules génétiques que nous avons intégré dans notre génome il y a des millions d’années. Leur réactivation, qui se produit particulièrement pendant la grossesse, peut faire apparaître des protéines d’enveloppe neurotoxiques. Certains patients produisent des auto-anticorps qui, par malchance, sont dirigés vers les neurotransmetteurs, qui régulent notre comportement…

« Les mêmes médicaments pour tout le monde »

Quelles pistes thérapeutiques engagez-vous ?

Des traitements immunomodulateurs. Des traitements visant à neutraliser certaines protéines d’enveloppe. C’est encore en grande partie de la recherche académique et fondamentale. Mais des essais sont en cours. Comme un essai européen lancé depuis deux ans, qui cible certains patients atteints de troubles bipolaires, traités avec des cytokines anti-inflammatoires.

Quelles sont les perspectives ?

Il faut que la psychiatrie devienne une médecine de précision, comme la cancérologie l’est devenue. Il faut identifier des cibles thérapeutiques, ce n’est pas différent. En psychiatrie, on a tendance à donner les mêmes médicaments à tout le monde. En gros, on a toujours un tiers de patients répondant bien aux médicaments, un tiers qui y répond partiellement, et un tiers qui n’y répond pas du tout. Le but est de développer de nouveaux outils pour prendre en charge les patients. Et au-delà de l’immunologie, nous développons beaucoup d’autre stratégies, comme la stimulation cérébrale.

Les troubles mentaux sont bien des maladies comme les autres ?

Il y a toujours cette idée que le cerveau est une boîte séparée du corps, notamment au niveau immunologique, par la barrière encéphalique. On sait depuis dix ans que c’est faux. Il y a des interactions constantes. Quand quelqu’un fait un épisode dépressif six mois après un Covid, on a du mal à faire le lien. Or il a été montré que ce risque augmente de 40 % à 60 %.

Article paru dans OUEST FRANCE du 5.01.21

ENTRETIEN. « Il faut que la psychiatrie devienne une médecine de précision », plaide Marion Leboyer (ouest-france.fr)

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